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Numéro 09 thématique de la revue Didactiques


Littérature et enseignement/apprentissage de la langue : des relations au gré des évolutions historiques et des représentations méthodologiques


DU TEXTE LITTÉRAIRE COMME SEUL DOCUMENT AUTHENTIQUE Littérature et FLE

François Migeot [1]
Université de Franche-Comté (France)

ISSN: 2253-0436 | Dépôt Légal: 2460-2012

Résumé | Plan | Texte integral | Bibliographie | Notes | Citation - Téléchargement

Le texte littéraire, plus que tout autre document réputé « authentique », peut occuper une place cruciale dans l’enseignement-apprentissage du FLE. Sur le plan linguistique, il prépare les conditions de sa propre lecture et contribue largement à construire l’encyclopédie de l’apprenant : qui plus est, il mobilise utilement les connaissances préalables du lecteur en terme de genre (conte, roman, nouvelle, poème etc.) et d’horizon d’attente relatif au genre. Sur le plan anthropologique (socio-culturel et interculturel), il est porteur d’informations narrativisées, et donc plus facilement accessibles, sur une société et une époque donnée. Enfin, sur le plan du sujet-lecteur, il suscite un engagement personnel qui le fait mobiliser la langue pour son compte, au-delà d’une simple dimension instrumentale.

The literary text, more than any other document supposedly ‘authentic’, can have a crucial role in the teaching and learning of French as a foreign language. On the linguistic level, it creates the conditions of its own comprehension and contributes significantly to the construction of the learner’s personal encyclopaedia. Moreover, it brings into operation the reader’s pre-existing knowledge in terms of genre (tale, novel, short story, poem, etc) and of his/her expectations relative to genre. On the anthropological level (socio-cultural, and inter-cultural) it may be the vehicle of information, in narrative form and so more easily assimilated, concerning a particular society or period. Finally, for the subject-reader, it encourages a personal engagement which enables him or her to use the language individually in ways which go beyond a simple instrumentality.


    ●     1 - Une problématique

    ●     2 - Évolution des représentations sur la littérature.

    ●     3 - La didactique et la question du sujet.

    ●     4 - Littérature et construction du sujet apprenant.

    ●     5 - L’écrivain comme médiateur,  l’enseignant comme passeur,  le texte comme allié.

    ●     6 - Le texte comme espace du jeu, du je.




1 - Une problématique

La Didactique du FLE, au cours de son histoire, a fait successivement alliance avec diverses autorités scientifiques de tutelle — les identifier nous conduirait du Behaviourisme au cognitivisme dans sa ligne dure, en passant par la linguistique structurale puis pragmatique — avant de prétendre à une autonomie toute récente, mais qui la situe encore à un carrefour ouvert à de nombreux vents, parfois contraires. Comme le dit Chiss[2]


La recherche de nouveaux référents théoriques en didactique du Français débouche souvent sur une situation marquée au sceau de l’éclectisme et de la juxtaposition 


En un mot, située d’un côté à la croisée de plusieurs modèles théoriques hétérogènes et déterminée d’un autre côté par une visée « applicationniste », elle est sans doute loin de former ce qu’on appelle un paradigme, c’est-à-dire un


ensemble d’orientations, d’attitudes, d’objets et de méthodes qu’une communauté de chercheurs à une époque donnée considère comme valable [3]


Toujours est-il qu’aujourd’hui, sous l’influence politique du Conseil de l’Europe, elle privilégie l’approche « actionnelle », comme s’en explique le CECRL[4], largement sous-tendue par l’ « approche par compétences » qui vise à produire les comportements linguistiques adéquats à la résolution d’une tâche.  Cette perspective, résolument fonctionnelle, qui s’articule aisément aux besoins du marché et de l’emploi, tend donc à instrumentaliser, aux profit de ces derniers, la langue à apprendre et le sujet qui l’apprend, et à réduire la relation pédagogique à une prestation de service. La récente promotion du CECRL et sa prétention à constituer un paradigme en DLE constitue sans aucun doute l’une des plus significatives avancées[5] de cette perspective. Sur ce point, je renvoie à l’ouvrage de Patrick Anderson[6] pour le domaine de la DLE et à un article de Reichler pour une critique plus générale de l’influence de ce modèle à l’université[7]. Il va sans dire que si je m’arrête un instant sur ces critiques, c’est naturellement qu’elles préparent le terrain sur lequel j’entends instal­ler mes propres positions.


Pour ce qui est de la place de la littérature au sein de la didactique des langues, elle n’a pas échappé à ces fluctuations, aux anathèmes et aux retours en grâce. Après avoir été longtemps considérée, dans les temps « pré scientifiques » de la grammaire-traduction, comme un passage obligé par ses «grands auteurs» et leurs « morceaux choisis » vers la langue cible, surtout approchée dans sa face écrite, elle a ensuite été écartée au profit d’une langue résolument orale, considérée comme prioritaire, car plus utilitaire ou plus efficace d’un point de vue interactionnel Avec la génération des méthodes dites « communicatives », elle a fait un timide retour et a parfois figuré, en concurrence avec des documents dit authentiques, à la fin d’une unité didactique pour illustrer un point de langue.


Depuis quelques décennies, et parallèlement à la vague fonctionnelle puis actionnelle, la littérature a connu un relatif regain d’intérêt. Chacun devait « entrer en littérature », « entrer en écriture »[8]. Il était même question d’envisager, du point de vue du FLE, une didactique de la littérature comme en témoigne le livre d’AmorSéoud[9].  Mais un retour à la littérature dans la perspective du FLE ne peut se faire — à moins d’instrumentaliser à son tour la littérature — sans interrogation sur la conception de l’objet littéraire qu’elle promeut, sans une interrogation sur le sujet à qui elle s’adresse, sans interrogation sur les enjeux de ce retour, sans interrogation sur la coupure épistémologique qu’elle est susceptible de fonder par rapport à une approche « actionnelle ».


Il est probable que l’intérêt renouvelé de la didactique pour la littérature de fiction[10] provient de la conjonction de plusieurs séries de facteurs qui se surdéterminent. Première série : le regard porté sur la littérature et sur le texte littéraire a considérablement évo­lué. Il est lui aussi le résultat d’une histoire[11]. D’objet laissé à la contemplation es­thétique et subjective de l’amateur, le texte est devenu un objet scientifique qu’une science dite « des textes » a prétendu examiner avec les garanties de l’objectivité, pour enfin devenir le lieu où se pose aujourd’hui la question du sujet dans la réception littéraire.


Deuxième série : la Didactique du FLE, passant du pôle de l’enseignement (où l’enseigné n’a pas de consistance propre) à celui de l’apprentissage et du sujet qu’elle baptise « apprenant », elle doit maintenant interroger ce sujet sur lequel elle discoure et interroger les relations du sujet et de la langue. Reste à savoir le périmètre qui sera accordé à ce sujet et à cette relation. L’apprenant ne sera-t-il qu’un « utilisateur » (pour ne pas dire tout de go un « client ») comme le définit le CECRL, délimité par les contextes d’utilisation et les tâches linguistiques à résoudre ; ou bien sera-t-il un sujet en devenir, déterminé par l’environnement social, mais aussi conscience (« condamnée à être libre ») telle que l’envisage la philosophie sartrienne, où encore être de désir et de langage, tel que l’envisage la psychanalyse.  Autant de questions sur lesquelles la littérature — telle que nous l’envisagerons —peut sans doute aider à réfléchir.



2 - Évolution des représentations sur la littérature

En quelques décennies, l’analyse du texte littéraire s’est enrichie des apports de la linguistique structurale puis pragmatique, des sciences du texte : de la sémiotique, de la poétique, de la narratologie. Plus récemment, l’analyse du contexte littéraire s’est également enrichie, de même que celle de la réception de l’œuvre. En un mot on a cessé de faire du texte — ou mieux : des morceaux choisis­— un objet de vénération quasi religieuse supposé devoir transmettre les valeurs (humanistes ?) dominantes, objet dont la production relèverait uniquement de l’inspiration ou du don et dont les procédures de fonctionnement relèveraient de l’ineffable ou de l’inexplicable. Une telle attitude envers le texte et son auteur bloquait toute analyse puisqu’elle faisait du texte le lieu d’une monosémie dont le créateur était le dépositaire et le propriétaire et dont l’institution scolaire se prétendait garante à travers des exercices comme l’explication de texte. Face à une telle conception de l’écriture littéraire, du côté de la réception, il n’était que de répéter, paraphraser, le sens déposé, un peu comme on le fait des saintes écritures ; et du côté de la production, il n’était que d’imiter servilement un modèle sacralisé. L’enseignement de la littérature n’a que trop longtemps fonctionné ainsi dans nos écoles.


 Puis, comme l’explique AmorSeoud :


On va dénoncer la pédagogie humaniste traditionnelle non seulement pour sa fonction idéologique, mais aussi et plus encore, pour le caractère peu ou pas « scientifique » des méthodes que cette fonction y autorise. Le biographisme, l’équation homme-auteur, per­sonne et personnage, l’illusion réaliste, etc., peu propices aux nouvelles exigences du moment — l’exercice de la rigueur, l’objectivité, la rationalité — ne sont plus acceptés, pas plus d’ailleurs que la théorie du reflet, de la transparence du langage qu’ils impli­quent ou qui les impliquent.



Cette critique fera place, comme je le disais, à une période « scientifique » à l’affût, comme il se doit, d’une recherche qui prétend se situer en dehors de l’idéologie et de la subjectivité. Si cette période féconde a eu, parmi de nombreux mérites, celui de venir à bout de tout l’héritage de Lanson et de Sainte-Beuve, de situer le texte dans son immanence et de le considérer comme production, voire comme productivité, et non plus comme création (cf. Jean Ricardou), il n’est pas sûr, en revanche, qu’elle ait su échapper au risque de monosémisation du texte par la science. Dans son article « La poésie et l’université »[12] Yves Bonnefoy évoque bien cette possible dérive et affirme que la littéra­ture, terrain d’application des théories, peut devenir alors


Une simple occasion dans un champ d’études où le principal souci sera l’élaboration et la clarification de théories qui se veulent sciences — sinon même l’affrontement, à tra­vers ces hypothèses critiques, des grandes sciences, par exemple la linguistique, qu’elles prétendent représenter.


On a pu craindre, en effet, que les approches rassemblées dans ce qu’on a appelé la nouvelle critique, après le choc salutaire et l’espace de liberté qu’elles ou­vraient, ne ramène la littérature à une structure de sens univoque qui est précisé­ment, dit Séoud,


L’objet de leurs constantes rivalités : une structure idéologique, une structure psychique liée à l’inconscient de l’auteur, ou bien, avec le structuralisme, qui se veut objectif, op­posé à toute spéculation interprétative, une structure tout court ; mais celles-ci ont toutes en commun le fait d’être, en général, exclusives les unes des autres. Structure rime avec clôture, ou mieux, avec fermeture. (p.95)


Tout en reconnaissant le bien fondé de ces critiques, on pourrait reprendre le problème par un autre bout et considérer que si toutes les approches des sciences du texte sont chacune isolément valide, c’est, qu’à leur insu, elles mettent toutes en jeu la po­lysémie qui fonde la littérarité du texte, cet infini du langage qu’il ouvre, cette galaxie de signifiants auquel Barthes l’assimile. À la différence du texte non littéraire,


Le texte littéraire permet une lecture plurielle ; d’une part, il peut être abordé sous différents angles d’analyse et, d’autre part, il se prête à de multiples lectures et donc à de multiples interprétations[13]


Chaque approche, plutôt qu’une fermeture, pourrait donc au contraire constituer une ouverture à la pluralité du texte, à condition qu’elle accepte de ne se considérer que comme une lecture et qu’elle accepte de réintroduire la figure opératrice du lecteur, qui, au moment de la réception, est le seul sujet du texte. Il en est l’interprète, celui qui se prête au jeu de mise en relation des signes. Toute lecture d’un texte littéraire est alors interprétation, et « interpréter un texte, dit Barthes, ce n’est pas lui donner un sens (plus ou moins fondé, plus ou moins libre), c’est montrer de quel pluriel il est fait ». On comprend, à partir de là, qu’une nouvelle sémiotique, peu sensible aux charmes des carrés sémiotiques ou des schémas actantiels, se tourne vers la pluralité du sens et s’ouvre à la polyphonie (Bakhtine), à l’intertextualité, mais aussi à la polysémie du texte « littéraire ».Avec ce qu’il nomme la sémiotique différentielle, Jean Peytard tente de


rendre compte de ce foisonnement lectural, de prendre en compte que le sens, loin de se fixer, varie et se renouvelle, que le texte est « ouvert » […], puissant d’une disponibilité polysémique, qu’il s’agit de voir, de détecter ou de définir dans le cadre d’une sémioti­que différentielle, et qui repose sur une typologie des entailles[14].


Entailles qu’il définit comme le point où le texte « fait signe », où « ça diffère », où « ça polysémise ». Ainsi, le texte littéraire est devenu un lieu privilégié pour l’observation du langage. Il en manifeste le pouvoir polysémique, les jeux du sens, les usages et les potentialités. Bref, pour reprendre un leitmotiv du même Peytard s’inspirant de Barthes, il est « laboratoire langagier ».


Ce à quoi l’on pourrait aussi ajouter, d’un autre point de vue, « laboratoire de culture », voire d’interculturel. En effet, sans renouer avec l’idéologie du reflet, on pourrait parler avec Henri Besse de la fonction anthropologique de la littérature[15] : un texte dans son élaboration, introduit un certain nombre de représentations de la culture au sein de laquelle il se construit, par la forme langagière même qu’il se donne, mais aussi par le système de références qu’il inclut et qui connotent une situation (au sens de Sartre). Mais si l’écrivain écrit dans une culture et dans une époque, il écrit en même temps contre une culture, dans la mesure ou les représentations qu’il intègre sont mises en jeu, voire en question, à travers le regard et la mise à distance que déploie l’œuvre. C’est donc parce que ces représentations sont toujours ambiguës, jamais monosémiques — ou alors nous rentrons dans le « message » et la littérature « engagée »[16]—, mises à distance, qu’elles peuvent être reprises à leur compte par d’autres qui en deviennent alors sujets. Et ceci aussi bien dans la contemporanéité de l’œuvre que dans sa postérité. De sorte qu’à la notion de polysémie, il faudrait ajouter celle de diasémie qui explique qu’une œuvre continue à nous parler (à nous et de nous) à travers le temps. En somme l’œuvre n’est jamais la réalité, mais toujours un regard sur la réalité, et la lecture devient regard sur un regard, ou à travers un regard, ouvrant ainsi une dimension interculturelle féconde dans la perspective d’une entrée en langue-culture étrangère[17].


Pour conclure provisoirement sur ce point, je dirai que le texte littéraire est devenu un lieu d’observation privilégié où une langue, une culture, une représentation du monde sont mises au travail et sont redécouvertes par l’entremise d’un sujet. Du côté de la production, l’écrivain se crée en tant que sujet par son écriture, il ne lui préexiste pas, mais il en serait plutôt le produit ; du côté de la réception, le lecteur, par sa collaboration, advient, en quelque sorte, comme sujet du sens qu’il produit. On comprend mieux alors qu’une didactique qui prétend à la fois se «centrer sur l’apprenant » — et qu’est-ce d’autre qu’un sujet ? — tout en déployant pour lui des fonctionnements de cette langue lestés de leur charge socioculturelle, puisse avoir recours massivement à la littérature. Henri Besse ne dit pas autre chose :


Parce qu’en lui la langue travaille et est travaillée plus que dans tout autre texte, parce que sa facture lui assure une relative autonomie par rapport à ses conditions de production et de réception, parce qu’il est l’un des lieux où s’élaborent et se transmettent les mythes et les rites dans lesquels une société se reconnaît et se distingue des autres, le texte littéraire nous paraît particulièrement approprié à la classe de français langue étrangère. [18]



3 - La didactique et la question du sujet

Abordons à présent la seconde série de facteurs qui me paraît justifier cet intérêt pour la littérature et qui me semble pouvoir s’articuler à la problématique du sujet dans l’apprentissage du FLE[19].


On connaît la fortune que connaît le terme d’apprenant, terme par lequel on veut signifier le rôle de sujet que celui qui apprend une langue tient dans cet apprentissage. Cette apparition du sujet dans la didactique est un fait relativement notable en soi, mais il semble qu’il opère trop souvent d’une manière restreinte, archaïque, voire dévoyée, réduit par des notions comme celles de motivations ou, surtout, de besoins langagiers qui confinent le sujet à la sphère de l’offre et de la demande et le replacent dans une perspective instrumentaliste de tâches à résoudre, ou, pire, dans une logique du Marché : les besoins en question n’étant finalement que ceux du marché du travail et ceux de « l’employabilité » chère à l’Europe. Il conviendrait encore d’interroger dans ce sens le CECRL.


Il me semble donc que ce sujet qu’on réintroduit, quand il n’est pas un simple cache-misère pour les in érêts économiques de l’Europe et de ses cadres[20] , est daté et qu’il est hérité du XIX° siècle[21], voire de Descartes ; il s’agit d’un sujet stable et transparent à lui-même. Or la psychanalyse freudienne, puis lacanienne, avec la notion d’inconscient, ont depuis longtemps remis en question ce sujet cartésien. Il en va de même chez Michel Pêcheux[22]pour qui le sujet disparaît au sein de l’hétérogénéité même de son discours. Hétérogénéité qui n’est pas sans rapport avec l’interdiscursivité bakhtinienne. Même la phénoménologie sartrienne, bien qu’opérant dans le seul champ de la conscience, avait déjà ébranlé l’idée d’un sujet identique à lui-même puisqu’elle en faisait un mouvement, un pour-soi condamné à se poursuivre sans jamais s’atteindre. Or, que nous offre la didactique ? un sujet stablequi seraitquelque chose d’acquis — voire d’inné — et de figé, une sorte d’en-soi, une essence que nous serions (devenus) et qui aurait alors à gérer par des processus cognitifs, somme toute assez mécaniques — et que l’on connaît au demeurant toujours fort mal—, l’apprentissage d’une langue seconde ou étrangère. Mais, ce qu’on ne peut penser alors avec ce sujet restreint, c’est que l’apprentissage d’une langue étrangère — et par là, je veux dire autre chose que d’apprendre à commander un caféou faire (par exemple) en anglais ce qu’on fait au travail (par exemple) en français — modifie considérablement celui qui s’y livre : la langue le produit en tant que sujet, elle le prolonge, le recrée[23], Ainsi, la notion de sujet est certainement à mettre autant après l’apprentissage, comme un de ses effets, qu’avant, comme déterminant cet apprentissage.


De telle sorte que la didactique, si elle veut vraiment réintroduire la question du sujet, ne peut faire l’économie d’une coupure épistémologique qui passerait par un questionnement de fond de la notion de sujet, ou mieux — s’il est en devenir, jamais identique à lui-même— des processus qui engendrent du sujet. C’est à ce prix que le sujet qui est en jeu (à tous les sens du mot) dans la littérature peut faire cause commune avec celui qui est remis en question dans l’apprentissage d’une langue étrangère.



4 - Littérature et construction du sujet apprenant

La question qui se pose à présent est de proposer, au plan de l’enseignement ap­prentissage, un moyen de lier une pratique pédagogique aux analyse précédentes.


Comment offrir à l’apprenant dans la langue étrangère les moyens de continuer à devenir celui qu’il est et ce qu’il a à être ? Partons de cette in­jonction de Coianiz : « il ne s’agit pas d’imposer au sujet des modèles naïfs d’être, mais de lui donner les moyens de réaliser en français ce qu’il est. Un enseigne­ment de langue ne saurait en aucun cas n’être qu’un ap­prentissage de formes linguistiques ». Ce que confirme Bourdet :


La rencontre d’une autre langue ne se réduit pas à la maîtrise d’un bagage lexical, d’un fonctionnement de règles, de repères culturels : sa réussite ou son échec, la mesure de sa progression, se décident sur un tout autre plan. Apprendre une langue étrangère, c’est découvrir, avec douleur, avec enthousiasme, que le monde est une représentation dont sa langue maternelle ne trace que l’une des figures. […]. C’est alors que la rencontre d’une autre langue devient décisive, nous obligeant, à moins de blocage, à prendre sa mesure, à devenir autre. On ne sort pas intact d’une expérience aussi riche et aussi profonde, et l’on a besoin d’aide pour fouiller l’autre langue. […]. L’apprentissage d’une langue est alors de plein droit une expérience esthétique, il touche à la formation de soi, au projet existentiel qui habite chacun de nous. [24]


Ce qui devient donc prioritaire, c’est de trouver le juste terrain où fonder cette relation, où l’apprenant, au-delà des modèles « naïfs, » pourra « réaliser ce qu’il est », et qui sait, plus que ce qu’il est. Il me semble que la littérature offre l’un de ces terrains d’expérimentation possibles car elle présente l’avantage de per­mettre à l’apprenant, par la médiation de l’enseignant, d’investir la langue étrangère et de s’y réaliser comme sujet.



5 - L’écrivain comme médiateur,  l’enseignant comme passeur,  le texte comme allié

Comme l’apprenant, l’écrivain est un être en quête d’identité qui, par son œuvre, tente de s’inscrire dans la langue. Dans la représentation du monde qu’offre une langue, l’écrivain va tenter d’y inscrire la représentation d’un monde singulier, le sien, et il peut l’offrir comme porte d’entrée à l’apprenant qui va, par sa lecture, en devenir sujet. La langue qu’offre l’écrivain dans son texte est toujours une langue singulière, pleine, qui, dans l’universel des lecteurs s’offre en fait à chacun d’entre nous et vient nous parler de nous. C’est cette parole en suspens, adressée à lui, que l’apprenant est invité à venir habiter.


Pour accéder à la langue étrangère, l’apprenant est moins bien loti que le nouveau-né natif puisque la lan­gue cible, loin d’être familière comme la langue maternelle, est étrangère (et il convient de faire résonner toute l’étrangeté inquiétante qui y est connotée), et que, pour opérer le passage, un pro­fesseur, même s’il est « assez bon »[25], ne remplacera évidemment jamais une mère, même si comme le dit Anderson « l’enseignant met en scène sa fonction maternelle dans l’espace transférentiel mais aussi sa position de père en tant que représentant de la Loi [ici celle du langage] » (p. 258)[26]. Mais on peut, à tout le moins, rêver qu’il fonctionne comme le parent qui se fait, par exemple, le porte-parole du conte qu’il donne à l’enfant avant de s’endormir; qu’il incarne par sa voix, par son corps une histoire, un texte ainsi revivifiés. Bien évidemment ceci requiert une implication transférentielle de l’enseignant qui devient l’organisateur d’une rencontre du texte et de l’apprenant, par l’intermédiaire d’une rencontre entre des «  individualités vivantes », comme le dit Philippe Meirieu :


La différence, dirions-nous, entre l’inculcation et l’apprentissage est dans le rapport des personnes qui peuvent s’anéantir dans l’objet qui leur sert de médiation ou se reconnaître, grâce à lui, en interaction… Qu’importe alors que « ça résiste » ou que « ça fonctionne » du moment que, dans leur travail commun, quelque chose se trame entre des individualités vivantes[27]


En somme comme, le dit Doubrovsky,


Il s’agit d’interposer sa personne, de prêter son être, de servir d’intermédiaire et, puisque c’est pour faire accéder à une jouissance, de servir d’entremetteur. […] Le professeur […] s’entremettant, se compromettant (personne ne peut plaider innocent) se met […] totalement en jeu pour incarner le verbe, dans une existence physique et collective sans commune mesure avec l’expérience solitaire des signes cueillis au silence de la page imprimée[28]


Et dans ce travail de transmission, l’enseignant trouvera dans le texte littéraire un allié de poids. En effet les travaux déjà bien connus de Umberto Eco (Lector in fabula[29] entre autres) ont mis en avant le caractère autodidactique du texte et surtout du récit. Le texte « est un produit dont le sort interprétatif doit faire partie de son propre mécanisme génératif » ; il attend et guide son lecteur, il en fait son sujet, il l’oriente, prévoit ses hésitations, joue avec ses attentes, et l’aide à construire ses représentations. Le « lecteur modèle » dont parle Eco est construit par le texte :


prévoir son Lecteur Modèle ne signifie pas uniquement “espérer“ qu’il existe, cela signifie aussi agir sur le texte de façon à la construire. Un texte repose donc sur une compétence mais, de plus, il contribue à la produire.[30]


Ce lecteur n’est donc pas présupposé au départ, il est la résultante des indications lectorales que l’œuvre déploie dans sa propre matière. Et puisque le texte, comme le dit Eco, ne souhaite pas faire « perdre » son lecteur, dans cette « partie », il met en place une stratégie qui vise à lui faciliter le jeu. La dissémination et la redondance des informations cumulées va faire en sorte que les plats — si l’on peut ainsi parler du sens — repassés plusieurs fois par le texte, permettent au lecteur de construire la « lecture modèle » programmée à son intention. On comprend, dans cette perspective, le caractère absurde et contre performant de l’usage en classe des « morceaux choisis » ou des « extraits » qui, privés de leur contexte, sont amputés, du même coup, non seulement du corps textuel, mais aussi de leur force didactique.


En ce sens le texte narratif diffère sensiblement de son concurrent didactique, le document « authentique », fonctionnel en diable, qui, lui, ciblé originellement  pour une fonction et un public préétabli (au sens où les publicistes parlent de cible), repose sur des implicites qui sont pré requis et qui délimitent le lectorat exclusivement visé. De surcroît, il ne développe son message que d’un seul coup, sans redondance ni ajouts. Celui qui ignore ce qu’est une « voie d’administration » ou une « posologie », s’expose, sans le secours de son pharmacien, à bien des déboires dans l’usage d’un médicament. Ainsi sans les secours du spécialiste (professeur ou pharmacien), le document authentique (que ce soit un mode d’emploi ou une publicité) reste fermé sur l’encyclopédie qu’il présuppose, et demandera, pour le rendre accessible à l’apprenant, une approche didactique longue et coûteuse. Ce qui revient à dire que, sorti de la sphère de consommation pour laquelle il est programmé, le document réputé « authentique » n’a plus rien de tel. En revanche, le texte narratif, beaucoup plus largement « ouvert » offre une relative autonomie dans la mesure où, sans même l’intervention d’une aide, il a plus généreusement préparé les conditions de sa compréhension. En ce sens, il n’y a que lui, tendu vers un lectorat universel, qui puisse prétendre être « authentique ».


Par ailleurs, et pour les mêmes raisons, le document « authentique » ne fera rien pour expliciter les référents qu’il convoque : il ne fera rien pour développer l’encyclopédie de son lecteur. Si l’on ignore par exemple que Lejaby est une marque de sous-vêtements féminins, on ne comprendra pas que le linge qu’un « dandy » portait à son visage dans l’une des dernières campagnes publicitaire de ladite firme, n’est pas un mouchoir baigné de larmes d’adieu, mais une pièce de lingerie intime.


En revanche, les référents socioculturels que le roman met en jeux sont progressivement construits par le récit, lequel ne fait pas de leur connaissance un préalable à sa compréhension. Par exemple, le Paris du début du XIX siècle est aussi exotique pour un français contemporain que pour un étudiant étranger, et pourtant, nous le reconstruisons tous en lisant Le Père Goriot. La pension Vauquer l’est tout autant et, cependant, nous la visitons et comprenons son fonctionnement interne pas à pas avec Balzac qui nous la commente.


A tout cela, ajoutons que le texte narratif présente encore d’autres avantages. Il mobilise des connaissances génériques de base que toutes les cultures partagent : tout le monde sait ce que c’est qu’un conte, qu’un mythe ; tout le monde sait comment se déroule et se développe une fiction. Non seulement parce que notre entrée dans la langue maternelle s’est normalement opérée par le biais des histoires et des contes dont l’enfance est demandeuse, mais encore parce que, tout un chacun, dans son propre quotidien, ce cesse de se raconter des histoires. Et grâce à la transparence générique, ce sont aussi, dans une large mesure, les mêmes usages de la langue qui seront attendus et reconnus — et donc, mieux assimilés en LE. On s’attend que le récit s’ouvre à un moment ou à l’autre sur du dialogue. On sera alors mieux à même de faire observer, in situ,  ce qui caractérise ces deux régimes : système des temps, déixis, discours direct ou rapporté ou métabolisé ou reformulé ou résumé ; registres de langue propres à l’oral, interactions, actes de parole, par opposition à la narration, etc. 


Par sa connaissance endogène, le lecteur sera aussi préparé à la reconnaissance des séquences typologiques que peut enchaîner et entremêler une fiction : narration, description, explication, argumentation, information et bien d’autres  encore. Enfin, pour les mêmes raisons, il ne sera pas insensible aux stratégies narratologiques mises en scène par le « discours du récit », pour parler comme Genette.  Toutes les catégories qu’il examine dans son Figure III[31]  peuvent être mobilisées dans ce travail de lecture, car déjà connues, au moins dans leurs usages les plus standardisés.


C’est à partir de ce « reconnu » que l’on pourra s’aventurer dans ce qui fait l’économie singulière d’une œuvre. C’est aussi à partir de ce contrat de lecture basique, celui du « lecteur modèle », qu’on pourra interroger ses limites et s’ouvrir à la polyphonie, la polysémie du texte qui s’offre au jeu d’une infinité de lectures, chaque fois créatrices d’un surplus de sens et, du même coup, créatrices  d’une nouvelle posture du lecteur qui se construit en lui.



6 - Le texte comme espace du jeu, du je

Ainsi, mettre le lecteur en position de sujet, le mettre en jeu pour qu’un je lecteur advienne, « se mettre en jeu pour incarner le verbe », pour reprendre la formule de Doubrovsky, c’est bien ce que propose le texte littéraire qu’on peut envisager par conséquent comme espace potentiel (Winnicott) de création de soi.


On sait l’importance que revêt le jeu comme lieu de création du langage[32] ; on sait que la classe, en tant que lieu déréalisé peut offrit un espace de jeu privilégié[33] pour accueillir et mettre en œuvre la fiction; il reste à suggérer que le texte littéraire, qui est fondamentalement jeu de langage, est simultanément espace de création du sujet.


Dans ce dessein, on pourrait s’appuyer sur les analyses de Michel Picard[34] qui montre que, comme les enfants que nous n’avons pas cessé d’être, notre rapport au langage est essentiellement ludique. La littérature ne fait que jouer sur le jeu qu’il y a dans le langage et tire le meilleur d’elle-même de notre disposition toujours vive au jeu. Il montre qu’à l’évidence, du moyen-âge jusqu’au surréalisme, la littérature met en jeu la langue et nous met en jeu par la langue. Et par le jeu littéraire, il explique que c’est notre humanité qui est en jeu, c’est-à-dire au travail, puisque nous sommes des êtres de langage, mais en jeu aussi dans sa dimension consciente et inconsciente, puisque l’œuvre offre à notre identité polymorphe tous les masques de l’imaginaire nécessaires à ses jeux identificatoires.


On aura compris que la figure du sujet qui était sollicitée par ce travail sur le texte de fiction n’avait pas grand-chose de commun avec l’utilisateur que dessine le CECRL, apprenant réduit à l’espace du travail, du marché et de quelques démarches et loisirs stéréotypés.


Naturellement une objection banale ne manquera sans doute pas d’être formulée ici. On dira que la langue du récit (mais lequel ?) n’est pas celle de la communication, que la langue littéraire n’a pas de vertus utilitaires. On dira encore que l’étude de la littérature requière au préalable des moyens linguistiques. On parlera du niveau de langue nécessaire à l’abord de telle œuvre. Ce type d’objection perd une bonne partie de son fondement si l’on observe qu’elle base son appréciation de la littérature sur une stylistique de l’écart qui considère que la langue  « littéraire » s’écarte d’une chimérique norme. En réalité la littérature ne fait que tirer parti des possibilités de la langue ; elle les met en scène, nous l’avons assez montré. La littérature est virtuellement disponible dans la langue, dans ses figures et dans ses jeux.


C’est ce que Paul Valéry disait déjà en son temps : « la littérature est, et ne peut pas être autre chose qu’une sorte d’extension et d’application de certaines propriétés du langage » et c’est ce que le linguiste Charles Bailly confirme :


L’écrivain se contente de transposer à son usage les thèmes qu’il trouve dans le langage de tout le monde et de les faire servir à ses fins, qui sont esthétiques et individuelles, tan­dis que le langage de tous est actif et social […]. Il est temps de ne plus considérer la langue littéraire comme une chose à part, une sorte de création ex nihilo ; elle est une transposition spéciale de la langue de tous[35].



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 [1] Cet article développe des positions formulées dans Recherches pédagogiques. Revue de l’Association Marocaine des Enseignants de Français. « La littérature en classe de français ». n°9, Agadir, 2003.

 [2] Chiss,J-L. « Quel statut pour les linguistiques dans la didactique du français » in Etudes de Linguistique Appliquée n° 59, Paris, Didier, 1985.

 [3] Attalah, P. Théorie de la communication, Presses du Québec, Québec, 1991.

 [4] Cadre Commun de Référence pour les Langues, Conseil de la coopération culturelle, comité de l’éducation, division des langues vivantes, Conseil de l’Europe, Strasbourg, 2000.

 [5] Voir mon article Le CECRL : Quel enseignement des langus pour l’Europe ?Langues pour le marché, marché des langues, in Terres de FLE, n° 1/2008, Université de franche-Comté, CLA.

 [6] Patrick Anderson : La didactique des langues à l’épreuve du sujet, Presses Universitaires Franc-Comtoises – Les Belles Lettres, 1999 : « La multiplication des méthodes se présente donc bien comme une tentative de séduction à la consommation d’outils pédagogiques présentés comme de plus en plus performants mais aussi comme une tentative à répéter sans cesse une course à l’innovation. Pour les langues, l’accroissement des outils pédagogiques et leur utilisation/consommation sont de ce point de vue apportés en tant que garant de l’acquisition/apprentissage. L’innovation est ainsi uniquement déplacée vers l’organisation des supports et sur leur présentation et non sur un examen des options retenues avant l’élaboration de ces matériels. L’ensemble de ce dispositif fait que la médiation de l’acte d’enseignement est déplacée vers les instruments qui vont en permettre la réalisation […] » (p 247).
 Voir aussi dans ce même livre, sur la question de l’éclectisme en didactique, le chapitre « Pédagogie et didactique », p. 25 et suiv., auquel j’emprunte les citations précédentes (notes 1 et 2).

 [7] C. Reichler : « L’Université et l’ “horreur économique“ », Le Monde du vendredi 25 04 97 : « Derriere la simplicité du schéma — je paie, tu m’apprends ce que tu sais — sont engagés au moins trois choses. D’abord, la question du temps : le modèle économique limite la relation au présent, à l’actualité de la transaction. Celle-ci est conçue comme un donnant-donnant tout entier réalisé dans l’échange ; L’enseignement n’est plus la transmission par la génération précédente à celle qui vient, d’un savoir et d’une expérience […]. Ensuite, la relation entre les deux acteurs est déterminée négativement : le contrat économique met face à face deux partenaires qui conviennent du prix d’un bien. Avant l’échange, ils ne se connaissaient pas ; après, ils n’auront plus rien à voir ensemble :

 [8] Jean-pierreGoldenstein : Entrées en littérature. Hachette 1990. Cahiers du CRELEF  n° 30 : «Entrées en écriture» Univ. de Franche-Comté. 1990.

 [9] AmorSéoud : Pour une didactique de la littérature, Hatier (LAL), 1997.

 [10] À cet égard la publication du n° 115 des Etudes de Linguistique Appliquée, coordonné par J.F. Bourdet, « Fiction littéraire et apprentissage des langues », Didier érudition, 1999, constitue sans doute une référence.

 [11] Voir sur ce point, entre autres, le livre de Marie-Claude Albert et Marc Souchon : Les textes littéraires en classe de langue, Hachette, collection « Autoformation », 2000.

 [12] Yves Bonnefoy, « La poésie et l’université » in Le Français dans le monde, n spécial « Littérature et enseignement », 1988.

 [13] Mireille Naturel : Pour la littérature, de l’extrait à l’œuvre, Clé International, 1995.

 [14] Jean Peytard et Sophie Moirand : Discours et enseignement du français, Hachette, 1992, et Jean Peytard« D’une sémiotique de l’altération » in Semen 8, Configurations discursives, Annales Littéraires de l’Université de Besançon - Les Belles Lettres, 1993.

 [15] Henri Besse : « Comment enseigner la littérature dans l’enseignement du FLE », in Ici et là n° 20, 1991.

 [16] « On n’engage que les domestiques » lançait Breton en réponse à « l’engagement » sartrien.

 [17] Ce qui donne à penser que, dans une perspective anthropologique, la littérature pourrait ouvrir à un univers culturel de manière plus authentique que les document mal nommés « authentiques ».

 [18] Henri Besse : « Quelques réflexions sur le texte littéraire et ses pratiques dans l’enseignement du français langue seconde ou langue étrangère » Le Trèfle n° 9, 1989.

 [19] Voir aussi ma communication : « Didactique du FLE et pratique de la littérature », in Le français dans le monde, recherches et applications, Hachette, juillet 1995

 [20] MIGEOT F., (2010) , « L’Europe et ses cadres : vers l’encadrement de l’énonciation et la mise en grille du sujet » in Kholer E. et Lopez Nuñoz J.M. (eds), Exterritorialité, énonciation, discours, Peter Lang Éditions scientifiques internationales, Berne, 2010, 221-238

 [21] Je renvoie làencore, pour une critique de fond, à l’important travail de Patrick Anderson, voir supra.

 [22] Michel Pêcheux, Les vérités de La Palice, Maspero, 1975.

 [23] Ce qui, soit dit en passant, explique bon nombre de résistances à la langue étrangère qui peut être vécue, à juste titre, comme une menace pour l’identité.

 [24] Jean-François Bourdet : « Littérature et apprentissage » in Les enseignements de la littérature Les Cahiers de l’ASDIFLE n° 3, 1991.

 [25] « Googenough » dit le psychanalyste anglais Winnicott quand il parle de l’attitude de la mère transmettant à l’infans sa propre langue, la langue maternelle. En effet, nous en­trons dans le langage par la langue maternelle, par la langue de la mère. Cela signifie déjà que la langue nous vient de l’extérieur, qu’elle nous vient de l’autre, et que nous entrons dans la langue par la bouche d’un autre, d’une autre. C’est ce que Didier Anzieu nomme « l’introjection de la bouche parlante de la mère ».

 [26] Je renvoie, sur ce pocessus transférentiel au détail des analyses développées dans mon article de 2003 cité supra (voir note (1).

 [27] Philippe Meirieu, Cahiers pédagogiques, n° 236.

 [28] Serge Doubrovsky, Parcours critique, Galilée,1980.

 [29] Grasset, 1985.

 [30] op. cit. p 69.

 [31] Gérard Genette, Figures III, Seuil,  coll. Poétique, 1972

 [32] Cf. mon article de 2003 (supra, note 1)

 [33] Tous les articles du n° 115 des Etudes de Linguistique Appliquée (ELA) (1999) développent longuement ce thème sous le titre  « Fiction littéraire et apprentissage des langues »

 [34] Michel Picard, La lecture comme jeu,  Minuit, 1986.

 [35] Charles Bailly, leLangage et la vie, Droz, 1952.


Pour citer cet article:

François MIGEOT, « Du texte littéraire comme seul document authentique: Littérature et FLE», DIDACTIQUES « littérature et enseignement/apprentissage de la langue : des relations au gré des évolutions historiques et des représentations méthodologiques » N°9 Janvier-Juin 2016, [ http://www.univ-medea.dz/ldlt/enligne.html ], pp.19-44




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